Il est vital de nommer la réalité dans toute sa complexité : seule la vérité permet de grandir et de guérir.
Il s’agit de regarder en face son existence, de s’interroger sur soi-même et de prendre le temps de réfléchir : même s’il
peut sembler plus facile d’avaler une molécule, même si exprimer ses fragilités n’est pas à la mode, à une époque ou le positivisme forcené n’est pas forcément de rigueur ; même si, dans notre culture, la mort est très souvent passée sous silence.
Le manque signifie « défection », « insuffisance », privation ». Il désigne le vide causé par l’absence durable d’une personne
chère ou par l’indisponibilité d’un moyen de satisfaction : dans ce cas, il s’agit plutôt de frustration. Le manque qui s’installe fragilise le sentiment d’exister. L’individu traverse l’épreuve douloureuse de son insatisfaction, voir de son impuissance.
La confrontation désagréable à la privation met l’être dans un mouvement de curiosité : aller vers autrui.
Se reconnaître manquant, insuffisant, incomplet, c’est accepter la non-possession et l’ouverture à l’aspiration, à l’élan
vers l’autre.
Lorsque le manque est dit, il peut se transformer en une demande.
Le manque est conscience d’un espace vide, d’une place nécessaire à trouver, afin de se sentir exister et existant. Par
l’épreuve du manque reconnu et exprimé, l’être peut se représenter ce qui est absent et ainsi créer une présence à venir.
Accepter de parler de ses manques permet de retrouver ses élans intérieurs pour vivre autre chose, autrement, sans rester fixé sur l’impossible ou au passé.
Saverio Tomasella
Le sentiment d’abandon